Lili Leignel, un témoignage de plus en plus rare !
#MEMOIRE Mardi 7 juin, 220 élèves de la quatrième à la terminale de l’établissement Saint Roch ont eu l’honneur d’assister au témoignage de Lili Leignel, rescapée des camps de concentration lors de la seconde guerre mondiale.
Lili se souvient très bien de la date de son arrestation : c’était le 27 octobre 1943 à Roubaix. Vers trois heures du matin, le fracas des gendarmes réveille toute la famille. Alors âgée de onze ans, la petite fille juive est arrêtée avec ses parents et ses deux frères : Robert, dix ans et André, âgé de trois ans et demi. L’aînée peine à comprendre ce qui est en train de se passer et pourtant, l’horreur est là. La famille est tout d’abord transportée dans la prison de Loos près de Lille avant de rejoindre celle de Saint-Gilles en Belgique sous la directive allemande. La petite fille est alors séparée de son père et se retrouve seule avec sa mère et ses frères. « Nous ne comprenions pas ce que nous faisions en prison, nous étions des enfants, des enfants si sages. » explique-t-elle.
Peu de temps après, la famille est transportée au camp de Malines. La petite Lili découvre alors l’horreur des camps de concentration : les coups de fouet, la mise à nu… une véritable humiliation. C’est entassés dans un wagon comme des bestiaux que Lili, sa mère et ses frères sont acheminés vers le camp de Ravensbrück. A peine arrivés, on leur rase la tête, les habille d’une robe rayée avec pour seule identité un numéro de matricule : « Ce numéro, nous devions le retenir en Français mais surtout en Allemands sous peine d’être puni. Encore maintenant je m’en souviens et je ne l’oublierai jamais » explique-t-elle.
La vie dans les camps était épouvantable : maladies, manque de nourriture, angoisses, peurs des SS et de leurs chiens… « Les journées étaient interminables. Nous ne jouions plus, nous n’étions plus des enfants comme les autres. Pendant ces années, nous avons vécu comme des ombres. » déclare Lili. Après le camp de Ravensbrück, elle et sa famille ont dû souffrir les affres du camp de Bergen Belsen appelé le camp de la mort lente. Les conditions d’hygiène sont déplorables, tous souffrent du Typhus : « Ma mère gisait sur le sol, je ne comprenais pas pourquoi, elle avait été si forte jusque-là. ».
Le 15 avril 1945 sonne l’heure de la libération avec l’arrivée des soldats anglais. Lili et ses frères sont rapatriés en France sans nouvelles de leur mère malade. A Paris, les trois orphelins sont recueillis par une assistante sociale avant que sa tante et son oncle ne viennent les chercher pour les emmener vivre aux Deux-Sèvres. « J’ai mis du temps avant de me souvenir que j’avais une famille en France. » explique Lili. Très vite, la fratrie est placée dans un préventorium pour être soignée. C’est au cours de leurs soins qu’ils retrouvent leur mère, vivante bien qu’affaiblie. « La vie reprenait alors un sens pour nous. » déclare l’ancienne déportée. Les enfants ne reverront cependant jamais leur père, mort mitraillé dans le camp de Buchenwald.
C’est avec une grande résilience, qu’à l’âge de quatre-vingt-dix ans, Lili Leignel continue de raconter son histoire aux jeunes générations. « Il me faut absolument témoigner pour que plus jamais de telles horreurs ne puissent se reproduire. L’être humain n’est pas raisonnable, le mal est partout, il faut être courageux et je compte sur les jeunes pour l’être, je sais qu’ils en sont capables. Les jeunes sont mes messagers. » affirme-t-elle.
Les jeunes se sont montrés très réceptifs au témoignage de Lili : « C’était très touchant. Ça nous montre que nous ne sommes qu’au début de notre vie. Ça nous enrichit de savoir ce qu’il s’est vraiment passé. C’est important, nous pourrons le transmettre à nos enfants plus tard. » explique Axel, élève de première. C’est donc dans cette volonté de devoir de mémoire que Lili a réalisé une fois de plus et ce après une quarantaine d’années de témoignage, ce qu’elle nomme sa mission : « Ma mission n’est pas achevée, j’ai encore beaucoup à faire. ».